L’année dernière, au moment de la mise en service de la piste cyclable, nous avions effectué une première série d’observations. Maintenant, après plus d’une année, quel est le bilan de cet axe? Voici nos observations.
Une piste née d’un espace partagée
Les cyclistes semblent avoir (majoritairement) intégré le bon sens de circulation, et ne circulent plus à contre-sens sur leurs pistes cyclables. Cela est sûrement dû à la densité de cyclistes.
Toujours des infractions qui réduisent l’espace pour les piétons et les cyclistes
De manière récurrente, des scooters sont garés abusivement sur le trottoir, limitant la place pour les usagers légitimes.
En été, les alentours de certaines habitations sont parfois envahis par une végétation dense et/ou trop basse, diminuant l’espace et créant du conflit.
Des défaut de l’infrastructure subsistent
Il y a toujours le problème de la jonction à l’Est, près de la station-service, avec la piste sur chaussée générale.
Certains rebords/bordures sont inconfortables à l’usage, car trop haut. Cela avait déjà été noté lors de nos observations de mai 2022.
Des panneaux problématiques
Des panneaux avaient été rapidement installés l’année dernière, afin de tenter de limiter les conflits piétons cyclistes sur ces trottoirs/espaces partagés. Bien qu’étant issus d’une intention louable, ils s’avèrent néanmoins problématiques.
Notons bien qu’il s’agit de panneaux pédagogiques, qui n’ont aucune valeur réglementaire.
Trois messages y sont communiqués :
- Priorité aux piétons.
- Cette injonction est ici incorrecte, c’est farfelu. Une piste cyclable (au sens de l’article R 110-2 du Code de la Route) est une “chaussée exclusivement réservée aux cycles”. Les piétons n’y sont absolument pas “prioritaires”.
La ville, ayant décidé de ne pas offrir une véritable piste cyclable à la place des voies de stationnement, essaye de limiter les conséquence du trottoir partagé en invoquant une prétendue priorité piétonne. C’est faux, il ne s’agit pas d’une aire piétonne.
- Cette injonction est ici incorrecte, c’est farfelu. Une piste cyclable (au sens de l’article R 110-2 du Code de la Route) est une “chaussée exclusivement réservée aux cycles”. Les piétons n’y sont absolument pas “prioritaires”.
- Vitesse raisonnable.
- Cette injonction montre bien les limites de cet espace partagé. Il est malheureux que l’on demande aux cyclistes évoluant sur un “axe majeur” de limiter leur vitesse. En effet, sur ce type d’axe, la vitesse devrait pouvoir rester soutenue (sauf s’il y a des panneaux réglementaires de limitation de vitesse) pour un trajet efficace.
- Cette injonction montre bien les limites de cet espace partagé. Il est malheureux que l’on demande aux cyclistes évoluant sur un “axe majeur” de limiter leur vitesse. En effet, sur ce type d’axe, la vitesse devrait pouvoir rester soutenue (sauf s’il y a des panneaux réglementaires de limitation de vitesse) pour un trajet efficace.
- Respect du sens de circulation.
- C’est la seule injonction qui est vraiment correcte, légitime. Il s’agit bien de pistes unidirectionnelles. Les piétons ont tendance, et c’est bien naturel, à empiéter sur la piste cyclable. En sachant que les cyclistes ne peuvent surgir que d’un seul côté, il est aisé d’être vigilant et de s’écarter tôt de la piste, sans danger.
Bien que ces panneaux partent d’une bonne intention, ils contredisent les dispositions du code de la route, et il est souhaitable que ce type de signalisation avec des messages incorrects ne se généralise pas.
Le stationnement motorisé reste trop souvent anarchique
Certes, les années de stationnement abusif et systématique sur l’espace piéton semblent derrière nous.
Néanmoins, bien que les véhicules motorisés bénéficient toujours d’un espace réservé majoritaire sur la voirie, le phénomène des stationnements anarchiques persiste.
Ces pratiques abusives détruisent les espaces enherbés, et forcent souvent les usagers de la piste à circuler très près des véhicules (les exposant ainsi au péril des portières qui peuvent s’ouvrir à tout moment…).
Des automobilistes ne veulent plus partager la chaussée générale
De nombreux automobilistes répugnent désormais à partager la chaussée générale, au prétexte qu’une piste cyclable (facultative) existe.
Une tendance s’est développée parmi certains conducteurs à invectiver les cyclistes qui choisissent de rouler sur la chaussée (ce qui est fréquent en cas d’impraticabilité des pistes cyclables, comme lorsqu’elles sont recouvertes de feuilles mortes).
Pourtant, les cyclistes ont tout à fait le droit légal de circuler sur la chaussée générale. Il y a d’ailleurs un certain nombre d’aménagements cyclables sur la chaussée (comme des panneaux M12 ou des sas vélo, ce qui est très bien).
Des panneaux pédagogiques à l’intention des automobilistes pourraient être une solution, en rappelant la légitimité de la présence des cyclistes sur la chaussée générale.
De plus, un rappel des règlements du code de la route à la Police Municipale est également nécessaire : lors d’une précédente interaction, il est très clairement apparu que les agents de la PM n’étaient pas du tout au fait des dispositions légales en vigueur et exprimaient même des opinions contraires au code de la route.
Maintenance trop restreinte en automne
L’automne apporte son lot de feuilles mortes sur les pistes. Une maintenance insuffisante a clairement été mise en évidence à ce moment : quand l’entretien est réalisé, c’est souvent trop tardivement, longtemps après le début de l’accumulation des feuilles.
L’évaluation d’une piste cyclable ne se limite pas à la qualité de ses infrastructures ; elle inclut également la qualité et la régularité de son entretien.
A ce propos, nous ignorons si une partie de l’entretien est de la responsabilité des riverains (arrêté municipal introuvable, s’il existe).
Sans entretien, l’espace praticable sur ce trottoir partagé est réduit, et cela conduit donc à une augmentation des conflits ainsi qu’à des risques de chute, pour les piétons comme pour les cyclistes.
Cette observation n’est pas uniquement du pessimisme : un de nos adhérents a en effet récemment chuté en raison d’un important tas de feuilles mortes sur la piste, qui était présent depuis de nombreux jours.
Une continuité limitée avec le reste du réseau
En continuant rue de l’École des Postes
La connexion avec le réseau à l’Est (au carrefour de la rue de l’École des Postes) est limitée car dangereuse. Le côté Ouest, en direction de l’avenue des États-Unis et du boulevard de la Reine, bénéficie d’un réseau cyclable bien plus sûr.
La qualité de la piste cyclable se détériore nettement en allant vers Viroflay par la rue de l’École des Postes, où il ne reste qu’une bande cyclable à côté des véhicules stationnés. Ce tronçon est particulièrement dangereux en descente, car la combinaison de la vitesse et du risque d’ouverture soudaine de portières de voitures peut causer de graves accidents.
Rappelons qu’un cycliste peut (et doit) s’écarter du bord droit de la chaussée en ville quand il longe des voitures en stationnement (article R412-9). La présence d’une piste cyclable tend à limiter cette pratique chez les cyclistes. Pire, cela entraîne même parfois de l’animosité des automobilistes envers les cyclistes qui choisissent de rouler non sur la piste, mais sur le bord droit de la chaussée principale, gardant une distance nécessaire à sa sécurité par rapport aux voitures stationnées.
En continuant rue Champ Lagarde
La situation est également dangereuse rue Champ Lagarde, un autre itinéraire utilisé par les cyclistes en provenance de la piste du Boulevard de la République. Cette rue, dépourvue de toute infrastructure dédiée au vélo, se distingue malheureusement comme l’un des rares axes de Versailles qui n’a pas encore été converti en zone 30.
Notons de plus que cette voie Champ Lagarde a été rénovée (par la ville ou par le département) à l’été 2021, sans qu’aucun aménagement cyclable n’ait été introduit.
C’est en contradiction avec le code de l’environnement (L. 228-2), qui indique que lorsqu’une route est rénovée, la personne publique en charge de ces travaux doit réaliser un aménagement cyclable approprié sur la voie ou mettre en place un itinéraire alternatif.
Conclusion
Rappelons que cette piste est issue de l’espace entre les habitations et les arbres, là où circulaient les piétons et où étaient souvent garés abusivement des véhicules. Parallèlement, les véhicules motorisés continuent de bénéficier de l’essentiel de l’espace sur la voirie, avec quatre voies motorisées à leur disposition (deux voies de circulation et deux voies de stationnement). L’espace restant partagé est trop étriqué pour les piétons et les cyclistes.
Certes, l’affluence de cyclistes sur la piste témoigne de son attractivité, démontrant un succès certain. Les cyclistes ont adopté l’aménagement, on voit par exemple que les points de stationnement vélo sont remplis le long de la piste.
Toutefois, le bilan est mitigé sur de nombreux points : stationnements récurrents abusifs et impunis, maintenance parfois limitée, certains défauts dans la réalisation (bordure, traversées cyclables), etc.
De plus, cette piste ne constitue qu’un simple tronçon du réseau cyclable versaillais et ne peut être considérée comme un “axe de liaison majeur”, comme cela a été annoncé.
En effet, la ville indique, noir sur blanc, que la priorité sur la piste cyclable n’est pas aux cyclistes mais aux piétons, avec une vitesse “raisonnable” (!).
Ensuite, à son extrémité Est, le parcours relativement sécurisé pour les cyclistes s’interrompt brusquement, ne laissant pas pour les cyclistes d’itinéraires suffisamment sécurisés pour continuer leurs trajets.
Il faut au plus tôt compléter les trous dans la maille du réseau cyclable versaillais.